L ’ ÉGALITÉ DU VOTE
Introduction
La répartition des sièges
Le plus fort reste
L’écart standardisé
La plus forte moyenne
Les assemblées réelles
La répartition matricielle
Le scrutin uninominal
Le scrutin pondéré
Le pouvoir du vote
Le pouvoir indirect
La juste pondération
Appendices
INTRODUCTION
Le mode de scrutin
Pour de multiples raisons, la démocratie directe, par la voie du référendum, ne peut être qu’occasionnelle. C’est pourquoi toute démocratie est représentative. Quel est alors le pouvoir du peuple ? Sur le plan institutionnel, il se réduit à peu de chose : le choix de ses représentants tous les quatre ou cinq ans. On pourrait au moins envisager un référendum lui permettant d’exiger de nouvelles élections à mi‑mandat*. Un contrôle plus fréquent rendrait toute action politique impossible. Cette nécessaire rareté de la consultation populaire oblige d’autant plus à prendre toutes les précautions afin que le scrutin exprime la volonté de la nation sans ambiguïté, par la participation égale de tous. Le système électoral le plus légitime est celui qui satisfait le mieux à ces deux conditions. La clarté du résultat est primordiale. Si elle n’est pas certaine en toutes circonstances, ce qui dépend exclusivement des modalités d’organisation du scrutin, le peuple est tout bonnement privé de son pouvoir. L’égalité du vote, elle, suppose que la voix de chacun soit réellement prise en compte, et de manière identique, dans la détermination du résultat. Elle découle certes du principe général d’égalité de droits, mais elle conditionne également la sincérité du scrutin.
En démocratie, c’est au travers des législatives que le peuple exerce sa souveraineté. Ces élections lui permettent, quand elles sont bien faites, de choisir une majorité parlementaire et, par ricochet, le chef du gouvernement. Même en France, même aux Etats-Unis, pays dans lesquels l’élection présidentielle joue un rôle prépondérant, seule l’onction des législatives confère le pouvoir effectif. Sans majorité parlementaire, le Président n’est qu’un inaugurateur de chrysanthèmes en France, un canard boiteux aux Etats-Unis. Ce sont donc bien les modalités du scrutin législatif qui déterminent l’exercice du pouvoir. Deux philosophies politiques s’incarnent en deux systèmes électoraux aux antipodes l’un de l’autre : la proportionnelle intégrale et le scrutin uninominal. Les systèmes intermédiaires cherchent surtout à faire prendre des vessies pour des lanternes.
Les partisans de la proportionnelle intégrale considèrent que le corps législatif doit constituer un échantillon représentatif du peuple. Une conception excessive de ce principe va jusqu’à réclamer la représentativité sur tous les plans. À l’extrême, il faudrait qu’on retrouve, parmi les députés, la même proportion d’illettrés que dans la nation tout entière. Et pourquoi les plus défavorisés ne pourraient‑ils pas être représentés par les meilleurs avocats ? Tout ce que requiert la démocratie, c’est que le parlement soit représentatif du peuple sur le plan politique. Et pour cela, le bulletin de vote de chacun doit avoir exactement la même valeur, ce qui implique que l’élection se déroule dans une circonscription nationale unique. Hélas ! la proportionnelle intégrale ne permet quasiment jamais de dégager une majorité parlementaire. Celle‑ci résulte alors de tractations entre les partis, au lendemain des élections, aboutissant à la formation d’une coalition et au choix d’un programme de gouvernement sur lesquels les citoyens n’ont pas été consultés et ne le seront pas. C’est le régime des partis, qui dépouille le peuple de sa souveraineté.
Le scrutin uninominal pousse à la bipolarisation. Son avantage est qu’il permet au peuple de trancher souverainement entre deux offres politiques. Son effet amplificateur est gage d’une majorité solide ; trop solide. Prenons l’exemple de l’Assemblée nationale française qui comprend 577 députés. Admettons qu’avec 52% des suffrages, la coalition gagnante ait remporté 346 sièges. Il pourra se faire, au cours de la législature, que la majorité se fracture sur un texte donné. Si 46 députés de la majorité le rejettent, avec l’ensemble de l’opposition, il sera pourtant adopté par la volonté de 300 députés… élus grâce aux suffrages de 45% des citoyens ! Qu’une loi puisse être imposée par les représentants de la minorité, c’est la négation de toute démocratie. De plus, on peut supposer que les députés de la majorité opposés au texte sont ceux d’un petit parti allié au parti dominant. Ce dernier n’en a cure puisqu’il peut se passer d’eux pour gouverner. Le scrutin uninominal rend inutile le dialogue et la recherche du consensus à l’intérieur du camp au pouvoir. Il affaiblit le législatif face à l’exécutif qui, par l’intermédiaire d’un parti tout puissant, dirige l’Assemblée de l’extérieur. Si la proportionnelle intégrale est la porte ouverte au régime des partis, le scrutin uninominal fait le lit du parti unique, une situation malsaine qui mène à des dérives de tous ordres. D’ailleurs, le scrutin uninominal, lui non plus, ne dégage pas toujours de majorité comme en témoignent les exemples de Theresa May en 2017, de David Cameron en 2010 ou de Michel Rocard en 1988.
Mais ne mélangeons pas tout. Si c’est bien à cause de proportionnelles mal conçues que la formation des gouvernements, au lendemain des élections, demande souvent des semaines, voire de longs mois, chez nombre de nos voisins, cela n’entraîne généralement aucune instabilité ministérielle subséquente. En Allemagne, malgré la proportionnelle, il n’y eut qu’un seul gouvernement renversé depuis 1949. Avec le scrutin uninominal à deux tours, de 1928 à 1940, la France vit défiler plus de gouvernements que sous la IVe République. L’instabilité ministérielle n’est donc pas spécialement liée à un mode de scrutin. Elle provient de ce que les députés sont politiquement irresponsables quand ils peuvent renverser le gouvernement sans que cela n’entraîne la dissolution de l’Assemblée.
* Dans le même ordre d’idées, le mandat du député étant de voter la loi au nom de la nation, il devrait en découler pour lui l’interdiction morale de voter une loi dont il doute qu’elle serait adoptée par référendum. Rien ne garantissant la vertu des élus, la nation devrait disposer d’un droit de veto à l’encontre de toute loi adoptée par le parlement, un droit échappant, par nature, à tout contrôle du législatif ou de l’exécutif. Quant à ses limitations éventuelles, elles devraient être clairement circonscrites de sorte que le juge constitutionnel ne dispose que du pouvoir d’appréciation le moins arbitraire possible. S’il va de soi que l’initiative d’un tel référendum devrait émaner d’un nombre suffisant d’électeurs et de départements, cela n’empêcherait pas des groupuscules bien organisés de déclencher à tout bout de champ un référendum n’ayant aucune chance d’aboutir. C’est pourquoi il serait bon que le juge constitutionnel pût préalablement commander un simple sondage d’opinion à un organisme public indépendant et n’ordonner la mise en œuvre du référendum que si le sondage faisait apparaître une majorité en faveur du veto. Si le risque de désaveu populaire était appréciable, l’Assemblée préfèrerait abroger la loi elle‑même, ce qui fait que la nation disposerait en permanence d’un pouvoir réel combien même l’organisation effective du référendum demeurerait exceptionnelle. Naturellement, ce droit de veto s’exercerait tout autant à l’encontre d’une modification de la Constitution ou de la ratification d’un traité. Par contre, un référendum d’initiative populaire tous azimuts serait la pire des démagogies. Qui souhaiterait ne serait‑ce qu’avoir à examiner certaines propositions qu’on imagine trop facilement ?
La division du corps
électoral
En France, l’élection présidentielle se déroule dans une circonscription nationale unique. La nation est interrogée en bloc et, lors du second tour, le vote de chaque électeur a une égale influence sur le résultat final. Chaque suffrage exprimé compte et la victoire ne peut revenir qu’à celui qui a été choisi par la majorité : le scrutin est sincère. Il en serait de même pour les législatives si elles étaient organisées pareillement, si le second tour n’opposait que deux partis, ou deux coalitions de partis, dans une circonscription nationale unique. S’il n’y avait qu’une seule voix d’écart entre les deux, le gagnant emporterait 289 des 577 sièges. Lorsque les législatives se déroulent au scrutin uninominal ou à la proportionnelle départementale, leur organisation est totalement différente. La consultation nationale unique est remplacée par un grand nombre de consultations locales et le résultat politique global est obtenu par agrégation des résultats particuliers. Qu’est‑ce qui nous assure que cette division du corps électoral n’a pas d’effet indésirable ? Imaginons un scrutin uninominal idéal. Le premier tour servirait à désigner les deux grandes coalitions admises à présenter chacune un seul candidat par circonscription au second tour. De la sorte, c’est bien la même question qui serait posée, et dans des conditions identiques, à tous les citoyens. Pour que les circonscriptions aient la même taille et qu’elles soient équivalentes du point de vue politique, elles ne seraient pas liées à un territoire ; c’est par tirage au sort à partir de la liste nationale des électeurs que chacun serait affecté à l’une d’entre elles. Dans ces conditions, s’il y avait 52% d’électeurs, disons de droite, au niveau national, il y en aurait autant, aux variations statistiques près, dans chacune des circonscriptions et la probabilité pour que la gauche enlève un seul siège serait quasiment nulle. Mais voyons ce qu’il adviendrait s’il y avait exactement le même nombre d’électeurs de chaque bord au niveau national. Les variations statistiques feraient toute la différence. Aussi petites soient-elles, elles feraient pencher la balance dans un sens ou dans l’autre. La droite et la gauche auraient la même chance de remporter les élections, mais ce serait une erreur de croire que la gagnante ne pourrait vaincre que d’extrême justesse. Le calcul des probabilités indique que l’écart entre les deux serait, en moyenne, de 19 sièges (soit un score de 298 contre 279). Il faut bien voir que la victoire ne dépendrait que de la répartition aléatoire des électeurs entre les différentes circonscriptions et, si l’on conservait cette répartition pour les élections suivantes, ce serait toujours le même camp qui l’emporterait si les intentions de vote ne changeaient pas. Prenons donc une telle situation moyenne dans laquelle, disons cette fois la gauche, enlèverait 298 sièges avec 50% des voix. Telle serait du moins la situation au moment de la constitution des circonscriptions. Mais le jour du vote, quelques semaines plus tard, l’opinion pourrait avoir changé. Supposons qu’un très petit pourcentage d’électeurs de gauche soient passés à droite et que cela suffise tout juste à faire basculer sept circonscriptions. La gauche, bien que minoritaire en voix au niveau national, l’emporterait encore avec cinq sièges d’avance et le principe de la souveraineté nationale serait bafoué. Un résultat extrêmement serré est fort improbable a priori, mais il n’en reste pas moins que le scrutin uninominal ne garantit pas la sincérité du résultat dans tous les cas. Ce vice, conséquence directe de la division du corps électoral, affecte bien sûr aussi la proportionnelle départementale. L’écart entre les deux forces en présence ne serait que d’une demi‑douzaine de sièges en moyenne, car il serait nul dans la moitié des départements (ceux ayant droit à un nombre pair de députés) et d’un siège seulement dans les autres. Mais, comme avec le scrutin uninominal, une coalition battue au nombre de suffrages pourrait enlever la majorité des sièges.
On peut simuler une parfaite égalité de voix entre la droite et la gauche, au niveau national, à partir des résultats du second tour de la présidentielle de 2007. Le candidat de droite l’ayant emporté avec 53% des suffrages, il suffit d’en faire passer 3% de la droite à la gauche. En procédant ainsi dans chaque circonscription, on obtient au moins une indication générale sur le résultat qu’on pourrait attendre de législatives organisées au scrutin uninominal dans les conditions que nous avons dites. Il y aurait cependant une différence essentielle par rapport à la situation idéale du paragraphe précédent. Dans cette dernière, les électeurs sont affectés aux circonscriptions par tirage au sort et, aux variations statistiques près, on retrouve partout le même rapport gauche/droite. Ici, il subsisterait de fortes inégalités. La droite conserverait parfois une majorité de plus de 60% (en Alsace, sur la Côte d’Azur, à Paris par endroits). La gauche n’a aucun bastion dans lequel elle domine à ce point ; pour qu’il y ait égalité de voix au niveau national, il faut qu’elle soit majoritaire dans un plus grand nombre de circonscriptions. La simulation effectuée dévoile les effets de cette dissymétrie : la gauche pourrait gagner bien que devancée de dizaines de milliers de voix au niveau national. Le risque de catastrophe démocratique n’est pas négligeable. D’ailleurs, l’avantage structurel de la gauche serait encore plus important mais, depuis 1958, le scrutin uninominal a toujours été organisé par la droite. La répartition des sièges entre les départements, fortement biaisée (voir le chapitre premier), favorise les plus petits et c’est toujours la droite qui a procédé au découpage électoral. Pour un département, même en respectant l’équilibre démographique entre les circonscriptions, il y a souvent une multitude de solutions possibles et il est facile de choisir celle qui vous fera gagner un siège ou deux. Dans un régime démocratique, ces opérations seraient confiées à un organisme public indépendant tel que l’INSEE. Finalement, l’avantage de la gauche est plus que largement compensé, mais c’est au prix de manipulations du scrutin.
En conclusion, tout système électoral fondé sur la division du corps électoral, outre qu’il ne peut être parfaitement sincère a priori, est tributaire des spécificités des circonscriptions. Chacune a une tradition politique propre, déterminée par la composition sociologique de sa population et par ses particularités culturelles, généralement héritées de l’histoire. Cet état de fait risque d’entraîner un résultat contraire à la volonté nationale. Le seul moyen de réduire ce risque, qui ne peut pas être totalement supprimé, est de trafiquer le scrutin de telle sorte que, en cas d’égalité de voix au niveau national, les deux blocs politiques en présence se retrouvent à égalité de sièges. Avouons qu’il s’agit là d’une perspective peu enthousiasmante pour le démocrate. Pour autant, un scrutin uninominal ainsi trafiqué honnêtement afin de le rendre quasiment sincère, se caractériserait toujours par son effet amplificateur bien connu avec, pour conséquence inéluctable, le régime du parti unique. La leçon de notre analyse est que tout système électoral qui découpe le choix national en une multitude de consultations locales présente les deux vices que nous venons de signaler : d’une part, le risque, minime mais qui ne peut être ignoré, de voir le pouvoir confié pour toute une législature aux représentants de la minorité ; d’autre part, la forte probabilité qu’une ou plusieurs lois soient adoptées contre la volonté des représentants d’une majorité de citoyens. Chaque territoire doit être justement représenté à l’Assemblée et la division du corps électoral, sur ce plan-là, est indispensable. Mais, du point de vue politique, l’élection ne peut se dérouler que dans le cadre d’une circonscription nationale unique. Les deux affirmations peuvent sembler incompatibles ; la fin du premier chapitre montrera qu’elles sont parfaitement conciliables.
Les réflexions précédentes ont déjà fait entrevoir ce que devrait être le système électoral des législatives et nous allons le préciser en détail. Reste la question de l’élection du Président de la République au suffrage universel, à laquelle les Français sont très attachés à présent. Ce n’est pas la fonction symbolique qui importe ; ce que veulent les citoyens, c’est désigner eux-mêmes le véritable chef du gouvernement. C’est leur apanage légitime en démocratie ; si toute souveraineté réside dans la nation, dès lors que le pouvoir politique est partagé entre l’exécutif et le législatif, les deux doivent relever du suffrage universel. Et comme le gouvernement du pays suppose la collaboration des deux, le mieux, afin d’éviter les crises, est que leur entente soit une conséquence automatique du système électoral. Nonobstant, un demi-siècle d’expérience nous a appris qu’une totale similitude entre les deux conduit, nous l’avons dit, à des dérives de tous ordres. Il faudrait donc que le système électoral permette encore d’éviter, autant que faire se peut, la mainmise d’un parti unique sur l’Assemblée, une condition essentielle à l’équilibre des pouvoirs. Les élections nationales que nous proposons nous semblent apporter une réponse satisfaisante à ces exigences multiples. Elles couplent les législatives et la présidentielle en un scrutin unique. Sont seuls admis à participer aux élections les partis qui présentent, dans chaque département, une liste complète de candidats aux législatives et qui déclarent soutenir l’un des candidats à la présidentielle, plusieurs partis pouvant soutenir le même par une déclaration commune. Inversement, peuvent seuls se présenter à la présidentielle les candidats soutenus par un parti au moins. Les bulletins de vote ne portent que le nom du parti et celui du candidat à la présidentielle, car les électeurs votent simultanément pour un candidat à la présidentielle et pour l’une des listes départementales qui le soutiennent. À l’issue du scrutin, la totalité des sièges de l’Assemblée sont répartis, proportionnellement au nombre de suffrages recueillis au niveau national, entre les seuls partis ayant soutenu soit le vainqueur, soit le second de la présidentielle. De cette façon, le Président élu dispose nécessairement de la majorité parlementaire. La répartition entre les listes départementales est telle que les sièges se trouvent aussi répartis entre les départements au prorata du nombre d’habitants et, dans chaque département, proportionnellement au nombre de suffrages recueillis par chaque liste. (Pour plus de précisions, voir la répartition matricielle, chapitre premier.)
Un parti ne peut donc être représenté à l’Assemblée qu’en participant à l’une des deux grandes coalitions susceptibles de l’emporter ou de finir seconde. Pour les partis situés aux extrêmes de l’éventail politique, cela suppose qu’ils mettent suffisamment d’eau dans leur vin. Pour autant, dès lors qu’ils représentent une part non négligeable de l’électorat, leur soutien devient indispensable à l’une ou l’autre des deux grandes coalitions pour espérer l’emporter. Cela constitue le jeu normal des tractations partisanes en démocratie, sauf qu’ici lesdites tractations se déroulent des mois avant les élections, ce qui fait que les citoyens décident en toute connaissance de cause. En définitive, seuls les partis refusant d’assumer le pouvoir dans le cadre démocratique du multipartisme sont exclus de l’Assemblée. La démocratie parlementaire suppose une majorité et une opposition ; elle ne souffre pas la présence de forces politiques qui auraient le pouvoir de bloquer le fonctionnement des institutions. Le système électoral proposé répond ainsi aux exigences de clarté et de sincérité du résultat. Il assure une juste représentation de la nation à l’Assemblée, tant du point de vue politique que du point de vue territorial. Il évite le danger du parti dominant grâce au partage équitable des sièges de la coalition gagnante entre les partis qui la composent. Fondé sur un scrutin de listes, il règle à peu près la question de la parité. Cerise sur le gâteau, il réduit l’actuel marathon électoral de quatre tours à un seul ! Si les deux coalitions arrivées en tête obtenaient quasiment le même nombre de voix, la majorité parlementaire serait fort réduite, mais on peut aussi trouver relativement anormal, pour une différence de quelques voix, de confier le gouvernement à une coalition donnée pour une législature entière, même s’il n’y a pas moyen de faire autrement. La fragilité de la majorité apparaîtrait alors comme une sorte de compensation, quoiqu’une majorité réduite puisse être très solides, ses diverses composantes étant contraintes à une concertation encore plus étroite. Ce système électoral conviendrait aussi bien pour les élections locales.
Au plan national, il induirait une évolution du paysage politique. Les partis minoritaires, actuellement tributaires du bon vouloir d’un parti dominant et, de ce fait, réduits aux miettes, pourraient enfin s’engager avec lui sur un pied d’égalité. Les citoyens n’auraient plus à choisir entre leurs convictions et le vote utile. L’électeur d’un petit parti saurait que son bulletin serait à la fois pris en compte pour l’élection de députés de son parti préféré (même si ce n’était pas forcément dans son propre département) et porté au crédit du candidat commun de la coalition à la fonction présidentielle. Il en résulterait un rééquilibrage politique, tant à droite qu’à gauche, et un parti ne pourrait plus dominer l’Assemblée à lui seul. Cela participerait à l’équilibre des pouvoirs entre le législatif et l’exécutif. Les deux étant détenus par la majorité, cette question ne concerne qu’elle. Le gouvernement, qui ne tiendrait plus l’Assemblée grâce à un parti godillot, aurait à collaborer avec toutes les composantes de la majorité. L’Assemblée ne pourrait renverser le gouvernement et le Président ne pourrait dissoudre l’Assemblée que par le recours aux élections anticipées. Tout autre est la question de l’équilibre des pouvoirs entre majorité et opposition. Dans une démocratie véritable, la constitution confierait à cette dernière la responsabilité de contrôler l’exécutif. Elle serait largement majoritaire dans une commission parlementaire qui aurait un pouvoir d’enquête permanent dans les administrations centrales et les ministères, y compris sur les documents classifiés secret. Il n’y a aucune raison de penser que ceux qui étaient au pouvoir quelques années plus tôt et qui y seront à nouveau quelques années plus tard soient plus irresponsables que ceux qui y sont à un moment donné. Le risque est infiniment moindre que celui de voir le secret couvrir des comportements antidémocratiques. S’il y a un domaine dans lequel il est légitime d’exiger le consensus, c’est bien celui des choses qu’il est préférable de cacher aux citoyens.
En démocratie, c’est le peuple qui vote la loi, soit directement, par la procédure du référendum, soit indirectement, par l’intermédiaire de députés élus au suffrage universel direct. S’il existe une deuxième chambre élue différemment, elle ne peut représenter le peuple avec la même légitimité. C’est pourquoi, en France, la chambre basse, celle qui représente le « bas » peuple, a logiquement la prééminence sur l’autre. Dès lors, la chambre haute ne peut avoir d’autre pouvoir que de gêner le travail parlementaire et l’action du gouvernement. L’argument dérisoire selon lequel elle enrichirait le débat justifierait aussi bien le tricamérisme. Si la navette législative paraît utile, mieux vaudrait l’organiser entre l’assemblée des députés et le gouvernement. En Allemagne, état fédéral, la chambre haute représente les régions et sa compétence est limitée à ce qui les concerne. Cependant, autant on peut estimer indispensable que le gouvernement consulte les assemblées locales préalablement à tout projet de loi touchant à leurs prérogatives, autant il est inadmissible qu’on porte atteinte, si peu que ce soit, à la souveraineté du peuple, représenté par ses députés, y compris sur ces questions‑là et a fortiori sur des questions d’ordre général. En France, pourtant république « une et indivisible », le Sénat est également réputé représenter les collectivités territoriales mais, d’une part, les différentes parties du territoire sont déjà justement représentées à l’Assemblée et, d’autre part, les sénateurs ne représentent pas les collectivités territoriales mais leurs élus. En Europe, le parlement monocaméral est désormais la norme : le Portugal a supprimé son sénat en 1926, le Danemark en 1953, la Suède en 1969, la Norvège en 2009.
En vérité, en dehors des états fédéraux, la seconde chambre, quand elle existe encore, joue souvent le rôle de garde‑fou protégeant des errements du peuple, parfois incapable de faire le bon choix aux législatives. L’exemple français est emblématique à cet égard. Les sénateurs sont prétendument élus au suffrage universel indirect, bien que le système électoral des sénatoriales ne réponde pas du tout à la définition de ce mode de scrutin (cf. chapitre II, section 2). En effet, plus de 99% des citoyens sont exclus du vote, car les sénateurs sont élus exclusivement par des élus. De surcroît, la constitution du collège électoral accorde une représentation proportionnellement 35 fois plus importante aux communes de moins de 1 500 habitants qu’aux villes de plus de 300 000 habitants et l’élection se déroule au scrutin uninominal dans les petits départements (ruraux), mais à la proportionnelle dans les plus grands (urbains). L’efficacité du tripatouillage est stupéfiante. En un demi‑siècle, le Sénat n’a été à gauche que pendant trois ans. Encore convient‑il de préciser que c’était à la suite d’une énorme bourde politicienne de la droite qui n’avait rien trouvé de mieux, peu avant les sénatoriales, que de donner aux préfets le pouvoir d’inclure d’autorité une petite commune dans une communauté de communes. Les petits villages n’ont guère apprécié. Depuis, tout est rentré dans l’ordre ; le Sénat est de nouveau à droite et devrait y rester ad vitam æternam. Le Conseil constitutionnel y veille et, lorsque le gouvernement Jospin prétendit apporter une modification homéopathique à la composition du collège électoral, son projet fut retoqué au motif que « le Sénat représente les collectivités territoriales ». Et gardons‑nous de demander naïvement quelles collectivités territoriales représentent les sénateurs élus par les Français de l’étranger.
Au demeurant, les pères de la Constitution avaient prévu un bouclage des institutions encore plus draconien. Le Président de la République, lui aussi, était élu par un collège excessivement restreint. La droite devait ainsi conserver éternellement la présidence de la République, le Sénat et le Conseil constitutionnel. Un hypothétique gouvernement de gauche n’aurait pu travailler que dans ces conditions. Heureusement, le général de Gaulle ne put se satisfaire, en tant que chef de l’état, d’une légitimité aussi douteuse. Dès son premier mandat, il fit modifier la constitution par un référendum établissant l’élection du Président de la République au suffrage universel direct. En fin de carrière, il proposa de dissoudre la chambre haute dans une espèce de machin économique, social et territorial, sans pouvoir politique. La gauche fit campagne contre le référendum, qu’elle qualifia de plébiscite, la droite ne défendit que du bout des lèvres une démocratisation dont elle ne voulait pas elle non plus, le non l’emporta, le Général partit.
À propos du Conseil constitutionnel, disons pour finir que la présence en son sein d’anciens politiques n’est pas gage d’impartialité et qu’on a le droit de s’interroger sur l’utilité démocratique d’un conseil chargé de veiller au respect d’institutions antidémocratiques : systèmes électoraux biaisés, bicamérisme, article 49.3, lois adoptées contre la volonté du peuple, cumul des mandats, etc. (Nous ne parlons évidemment, ici, que de la démocratie en tant que système de gouvernement et non en tant que système de valeurs.) S’il apparaît utile de conserver un organe chargé d’alerter le législateur sur le risque d’atteinte aux grands principes démocratiques, le Conseil d’état pourrait parfaitement remplir cette fonction.
CHAPITRE PREMIER :
LA RÉPARTITION DES SIÈGES
Le partage des sièges de l’Assemblée revêt deux aspects. Du point de vue politique, les sièges sont répartis entre les différents partis en lice. Ce qui est en jeu, c’est la détermination de la majorité parlementaire et l’équilibre entre ses composantes, autrement dit, le gouvernement du pays pour la législature. Si l’on veut que le vote de chaque citoyen soit pris en compte également, le partage doit se faire proportionnellement au nombre de suffrages recueillis par chaque formation. Par définition, ce n’est réalisé que par une proportionnelle intégrale, comme dans le système électoral que nous avons proposé. Du point de vue territorial, les trois modes de scrutin cités (élections nationales, proportionnelle départementale, scrutin uninominal) répartissent préalablement les sièges de l’Assemblée entre les départements au prorata de leurs populations respectives. C’est donc cette dernière répartition que nous prendrons pour sujet d’étude, étant entendu que nos conclusions s’appliqueront aussi bien, mutatis mutandis, à la répartition politique.
La quote‑part d’un département est donnée par une simple règle de trois :
Pop
Q = ∑(S)×––––––
∑(Pop)
La difficulté, c’est qu’une quote‑part n’est jamais entière. Le député ne supportant guère le saucissonnage, il faut se résoudre à arrondir et l’on comprend immédiatement que certains départements seront avantagés et d’autres défavorisés. Tout l’objet des différentes méthodes de répartition est précisément d’arrondir ces quotes‑parts le plus équitablement.
Nous commencerons par examiner la plus simple d’entre elles, dite au plus fort reste. Elle se fixe pour objectif d’accorder à chaque département le nombre de sièges (S) qui minimise l’écart par rapport à sa quote‑part : |Q-S|. Dans une première phase, elle commence donc par arrondir chaque quote‑part à l’entier le plus proche. Si, par chance, le total des sièges ainsi attribués à l’ensemble des départements est égal à la somme des quote‑parts, le partage est terminé. C’est rarement le cas. En général, on aura réparti trop de sièges ou pas assez et il faudra alors, dans une seconde phase, opérer les corrections nécessaires. Naturellement, retirer un siège à un département ou lui en octroyer un de plus augmente forcément son écart. La méthode du plus fort reste est conçue de façon à minimiser cette augmentation pour chaque département et, par suite, de façon à minimiser aussi la somme des écarts. De manière imagée, on peut dire qu’elle se refuse à introduire un surcroît d’injustice au‑delà du strict nécessaire. Pour cela, s’il faut ajouter un siège, elle l’attribue au département ayant provisoirement le plus fort reste (Q-S). Symétriquement, s’il faut en soustraire un, elle le retire au département ayant provisoirement le plus fort excédent (S-Q).
En définitive, les corrections se font toujours au plus fort critérium :
∆ = ± (Q-S) |
selon que des sièges sont à ajouter(+) ou à retirer(–).
La méthode outrepassée
Un département dont la quote‑part est inférieure à 0,5 n’obtiendra aucun siège lors de la première phase. Il pourra se faire qu’il en obtienne un lors de la seconde, mais c’est exceptionnel. Or, lui en accorder un est une décision politique (que l’on songe à Saint‑Pierre et Miquelon). On outrepasse alors la méthode en lui en octroyant un que l’on retire au département ayant le plus fort excédent (S-Q). En revanche, s’agissant de la répartition des sièges entre les partis au prorata des suffrages recueillis, il n’y a aucune raison d’en accorder un à une formation qui n’a pas obtenu suffisamment de suffrages pour cela.
Les paradoxes du plus
fort reste
SITUATION 1 |
Population |
Q |
S |
∆ |
S |
B |
699 680 |
22,32 |
22 |
+
0,32 |
22 |
C |
386 180 |
12,32 |
12 |
+
0,32 |
12 |
D |
199 330 |
6,36 |
6 |
+0,36 |
7 |
1
285 190 |
41,00 |
40 |
41 |
||
SITUATION
2 |
Population |
Q |
S |
∆ |
S |
A |
991 960 |
31,80 |
32 |
–
0,20 |
32 |
B |
699 680 |
22,43 |
22 |
+0,43 |
23 |
C |
386 180 |
12,38 |
12 |
+ 0,38 |
12 |
D |
199 330 |
6,39 |
6 |
+ 0,39 |
6 |
2 277 150 |
73,00 |
71 |
73 |
||
SITUATION 3 |
Population |
Q |
S |
∆ |
S |
A |
1 014 930 |
32,22 |
32 |
+ 0,22 |
32 |
B |
701 190 |
22,26 |
22 |
+ 0,26 |
22 |
C |
385 560 |
12,24 |
12 |
+ 0,24 |
12 |
D |
197 820 |
6,28 |
6 |
+0,28 |
7 |
2 299 500 |
73,00 |
72 |
73 |
||
SITUATION 4 |
Population |
Q |
S |
||
A |
1 014 930 |
33,10 |
33 |
||
B |
701 190 |
22,87 |
23 |
||
C |
385 560 |
12,58 |
13 |
||
D |
197 820 |
6,45 |
6 |
||
2 299 500 |
75,00 |
75 |
À titre d’exemple, voyons comment cette méthode répartit les 41 sièges d’un conseil régional. La région en question comprend trois départements (B, C, D) et le calcul du partage est détaillé ci‑dessus (situation 1). La première phase n’attribue que 40 sièges ; le dernier, octroyé au plus fort reste (Q-S), revient au département D.
Mais l’histoire de notre région est loin d’être terminée. À quelque temps de là, considérant que les régions sont un peu trop petites, on procède à un regroupement et l’on adjoint à celle qui nous intéresse un quatrième département, A. Naturellement, on augmente aussi le nombre de conseillers ; on calcule pour cela que le département A devrait en avoir 32 et l’on porte leur nombre à 73, les autres départements devant, de cette manière, pense-t-on, conserver chacun le nombre de conseillers détenus antérieurement. C’est donc uniquement par nécessité administrative qu’on procède au partage officiel des 73 conseillers entre les quatre départements. Et effectivement, le nouvel arrivé en reçoit bien 32, mais, ô surprise, le département D en perd un au profit de B ! (situation 2)
Des surprises, il y en aura d’autres. Un peu plus tard, pour prendre en compte les chiffres du dernier recensement, on procède à un nouveau partage. Sachant que la population de la région a augmenté, on s’attend peut-être à ce qu’un département dont la population a augmenté elle aussi, conserve le même nombre de conseillers ou en gagne un. Il est toutefois possible qu’il en perde un : il suffit pour cela que sa population ait augmenté moins vite que celle de la région et qu’il ne représente plus désormais qu’un pourcentage moindre de la population totale ; c’est ce qu’il se produit pour le département B. Mais on ne s’attend certainement pas à ce qu’un département puisse gagner un siège si sa population a diminué alors que celle de la région a augmenté ; c’est pourtant ce qu’il se passe pour D ! (situation 3)
Une nouvelle réforme administrative modifie alors légèrement le nombre de conseillers et celui de notre région passe à 75. À nouveau, on se remet à partager. De prime abord, beaucoup penseront que, sur les quatre départements, deux devraient conserver le même nombre de conseillers et les deux autres en gagner un. Mais là encore, surprise, grâce à ces deux conseillers supplémentaires, le département D se retrouve avec un conseiller en moins ! (situation 4)
Le comportement incohérent de la méthode du plus fort reste provient de ce qu’elle se fonde sur l’écart brut : |S-Q|.
L’écart
standardisé
Si la quote‑part d’un département vaut 2,5 et qu’on lui attribue soit 2 soit 3 sièges, sa part standardisée (S/Q) vaudra 0,8 ou 1,2 et on comprendra immédiatement qu’il a obtenu soit 20% de moins soit 20% de plus que sa juste part. L’idéal serait que la part standardisée de tous les départements soit égale à l’unité, mais ce n’est possible pour aucun. Le mieux qu’on puisse se proposer, c’est de minimiser les écarts standardisés : |S/Q-1|. Dans une première phase, la méthode de l’écart standardisée (MES) arrondit chaque quote‑part à l’entier le plus proche, exactement comme celle du PFR. Si le total des sièges attribués est égal à la somme des quotes‑parts, le partage est terminé. Sinon, il convient, dans une seconde phase, d’apporter les corrections nécessaires. Si l’on octroie un siège supplémentaire à un département, son écart standardisé augmente d’une valeur :
S+1 1 – ––– Q |
– |
S –– – 1 Q |
et, pour minimiser l’augmentation, on attribue ce siège au plus fort critérium :
∆ = |
S 1 – –– Q |
– |
S+1 ––– – 1 Q |
Symétriquement, s’il faut retirer un siège, cela se fait au plus fort critérium :
∆ = |
S 1 – –– Q |
– |
S-1 ––– – 1 Q |
Finalement, une correction s’effectue toujours au plus fort critérium :
|
selon qu’un siège doit être ajouté (+) ou retiré (–).
Le cas échéant, il convient d’outrepasser cette méthode dans les mêmes conditions que celle du PFR mais, bien entendu, en utilisant le critérium ∆ ci-dessus. Si à présent on use de la MES pour effectuer les partages des quatre situations examinées précédemment, tous les paradoxes du plus fort reste s’évanouissent : la MES est cohérente.
Les répartitions
d’exception
La méthode du PFR arrondit toute quote‑part à l’un des deux entiers les plus proches. C’est aussi ce que fait généralement la MES, mais pas toujours. Voyez la répartition suivante :
MES |
PFR |
|||
Q |
S |
S/Q |
S |
S/Q |
1,61 |
2 |
1,242 |
1 |
0,621 |
1,62 |
2 |
1,235 |
2 |
1,235 |
1,63 |
2 |
1,227 |
2 |
1,227 |
8,14 |
7 |
0,860 |
8 |
0,983 |
∑|S/Q-1| = 0,844 |
∑|S/Q-1| = 0,858 |
Il convient cependant de préciser que, si la MES peut être contrainte, afin de minimiser la somme des écarts standardisés, d’accorder à un département un nombre de sièges s’écartant de sa quote‑part de plus d’une unité, c’est quelque chose de rarissime. Ce n’est guère possible que si un nombre restreint de sièges est à répartir entre un petit nombre de départements. Pour le partage des sièges de l’Assemblée, cela relèverait du miracle statistique. (On reconnaît un miracle à ce qu’on n’y assiste jamais.)
Le biais a priori
Le fait que la MES minimise la somme des écarts standardisés, c’est‑à‑dire la somme des injustices, implique‑t‑il que cette méthode ne soit pas biaisée ? …qu’elle ne favorise pas globalement les petits départements au détriment des grands ou l’inverse ? La vérification ne peut porter sur aucune répartition réelle, car on ne peut pas s’attendre à ce que, dans le partage des sièges de l’Assemblée, par exemple, il y ait une parfaite égalité entre la somme des quotes‑parts et le nombre de sièges attribués à l’ensemble des départements compris dans un intervalle de quotes‑parts donné ; les départements sont bien trop peu nombreux pour cela. L’absence de biais ne peut se vérifier que dans la répartition a priori. Cette dernière considère une infinité de quotes‑parts régulièrement espacées de zéro à l’infini. Pour les besoins de la démonstration, prenons un nombre astronomique N de quotes‑parts régulièrement espacées entre 1 et 2. Il est aisé de calculer que la somme de ces quotes‑parts vaut 1,5 N. Dans la phase initiale de la répartition des sièges selon la MES, toutes celles qui sont inférieures à 1,5 sont arrondies à 1 et toutes celles qui sont supérieures à cette valeur limite sont arrondies à 2. Il en découle que la somme des sièges attribués est, elle aussi, égale à 1,5N et la répartition est terminée d’emblée. La part standardisée globale (le rapport du nombre de sièges répartis à la somme des quotes‑parts) valant exactement 1, cela signifie que la répartition n’est biaisée ni en faveur ni au détriment des départements de l’intervalle [1 ; 2]. On peut répéter la même chose pour tout intervalle et on en conclut que la MES n’est pas biaisée du tout. Mais le lecteur ne manquera pas de remarquer immédiatement que le raisonnement vaut tout autant pour la méthode du PFR. Et en effet, la méthode du PFR, elle non plus, n’est pas biaisée et elle est donc rigoureusement indiscernable de la MES a priori. Mais les deux méthodes se comportent différemment dans une répartition réelle. Admettons que seules les quotes‑parts 1,65 et 2,70 soient encore en lice pour l’attribution d’un dernier siège rectificatif. Le PFR l’attribuera à la plus grande et la MES à la plus petite. Mais si c’est entre les quotes‑parts 1,35 et 2,30 qu’il faut trancher, il reviendra à la plus petite pour le PFR et à la plus grande pour la MES. Tout cela se compense a priori, mais pas dans une répartition réelle. Toutefois, pour le partage des sièges de l’Assemblée sur la base des populations 2009, les répartitions selon la MES et selon celle du PFR ne diffèrent que par le transfert d’un seul siège entre les Ardennes et le Bas‑Rhin.
Les données bien
arrondies
Il arrive fréquemment, dans maints domaines, qu’après avoir arrondi une série de données, disons à 0,1 près, le total des arrondis soit égal à 99,9 ou à 100,2 au lieu des 100,0 attendus. Le remède consiste à répartir les 1000 unités de 0,1 chacune proportionnellement à la valeur de chaque donnée, selon la MES. C’est ainsi qu’on minimisera la somme des écarts standardisés |arrondi/donnée – 1|. Il va sans dire que la remarque vaut tout autant, quel que soit le total attendu.
La méthode traditionnellement désignée en France comme méthode de la plus forte moyenne a été inventée en 1792 par Thomas Jefferson, troisième président des Etats-Unis, puis exposée à nouveau en 1878 par Victor d’Hondt, professeur de droit à Gand. Elle fait partie d’une famille qui comporte de nombreuses variantes et sous-variantes. Trop souvent, il faut le dire, elles sont présentées sous la forme d’algorithmes ésotériques qui, appliqués à la lettre, aboutissent à la répartition voulue, mais ne facilitent pas leur compréhension. Nous espérons échapper à cette critique. Elles visent à un partage équitable des sièges entre les départements (en fait, à l’origine, entre les partis, mais cela revient au même). On choisit généralement de les appliquer en répartissant les sièges un à un, du premier au dernier. Nous nous limiterons aux variantes principales. Reprenons, à titre d’étude, la situation 4 examinée plus haut (voir : les paradoxes du plus fort reste). Supposons que 71 sièges aient déjà été répartis et qu’il faille décider à qui ira le suivant. La méthode de Jefferson calcule pour cela la moyenne d’habitants par député à laquelle parviendrait chaque département si c’était lui qui obtenait le siège en jeu. Celui-ci est alors attribué à la plus forte moyenne, en l’occurrence celle du département A, lequel passe de 31 à 32 sièges. Pour fixer les idées, voici la fin des opérations dans l’exemple choisi :
Population |
S |
moy |
S |
moy |
S |
moy |
S |
moy |
S |
|
A |
1 014 930 |
31 |
31 717 |
32 |
30 755 |
33 |
29 851 |
33 |
29 851 |
34 |
B |
701
190 |
22 |
30 487 |
22 |
30 487 |
22 |
30 487 |
23 |
29 216 |
23 |
C |
385 560 |
12 |
29 658 |
12 |
29 658 |
12 |
29 658 |
12 |
29 658 |
12 |
D |
197 820 |
6 |
28 260 |
6 |
28 260 |
6 |
28 260 |
6 |
28 260 |
6 |
2 299 500 |
71 |
72 |
73 |
74 |
75 |
Le département qui emporte un siège supplémentaire voit sa moyenne diminuer à l’étape suivante et on comprend vaguement l’économie de la méthode : en faisant baisser, à chaque attribution de siège, la moyenne la plus élevée, on devrait, à l’issue du partage, se retrouver avec un ensemble de moyennes très proches les unes des autres. Les députés devraient représenter à peu près le même nombre d’habitants dans tous les départements.
John Adams, deuxième président des Etats-Unis, présenta sa propre méthode peu de temps après. Elle est officiellement désignée en France comme méthode de la tranche. Elle fonctionne exactement de la même façon que la précédente, à ceci près qu’elle ne se fonde pas sur la moyenne à laquelle parviendrait chaque département s’il enlevait le siège en jeu, mais sur la moyenne qui est provisoirement la sienne compte tenu des sièges qu’il a déjà obtenus. On aboutit à un résultat différent :
Population |
S |
moy |
S |
moy |
S |
moy |
S |
moy |
S |
|
A |
1 014 930 |
31 |
32 740 |
31 |
32 740 |
32 |
31 717 |
32 |
31 717 |
32 |
B |
701
190 |
22 |
31 872 |
22 |
31 872 |
22 |
31 872 |
22 |
31 872 |
23 |
C |
385 560 |
12 |
32 130 |
12 |
32 130 |
12 |
32 130 |
13 |
29 658 |
13 |
D |
197 820 |
6 |
32 970 |
7 |
28 260 |
7 |
28 260 |
7 |
28 260 |
7 |
2 299 500 |
71 |
72 |
73 |
74 |
75 |
Faisons quelques remarques avant de poursuivre. Avec la méthode d’Adams, le département A n’obtient que 32 sièges pour une quote-part de 33,10. On comprend que si l’on commençait par arrondir directement toutes les quotes‑parts par défaut avant de répartir un à un les sièges restants, il en obtiendrait 33 et que c’est pour cela qu’on répartit les sièges un à un, du premier au dernier. Certes, arrondir à 32 une quote‑part de 33,10 peut sembler étonnant, mais l’arrondi à 34, par la méthode de Jefferson, ne l’est guère moins. Toutes les méthodes de cette famille calculent une moyenne d’habitants par député. Pour les deux que nous venons de voir, la population de chaque département est divisée successivement par la suite des nombres entiers. Pour la méthode d’Adams, le premier diviseur est zéro, ce qui assure au moins un siège à tout département. Celle de Jefferson, au contraire, n’attribue a priori aucun siège à un département dont la quote‑part est inférieure à 1 et doit donc éventuellement être outrepassée. Toutes les méthodes de cette famille fonctionnent de la même façon, leur seule différence étant que chacune utilise sa propre suite de diviseurs. C’est la raison pour laquelle on les désigne comme des méthodes de diviseurs. (La méthode de la tranche, technique particulière pour la mise en œuvre de la méthode d’Adams, est expliquée en fin de section.)
Mais revenons aux deux premières méthodes illustrées. Leur utilisation pour effectuer des répartitions dans des situations électorales variées, conduit bien vite à la conviction que celle de Jefferson avantage les grands départements et que celle d’Adams favorise les petits. On est alors tenté de chercher des formules intermédiaires. Admettons qu’au cours d’une répartition un département ait déjà obtenu 6 sièges. Nous avons vu que, dans ce cas, pour calculer sa moyenne, la méthode d’Adams divise son nombre d’habitants par 6, alors que celle de Jefferson le divise par 7. Comme il semble plutôt que la vérité se situe entre les deux, on pense aussitôt à utiliser pour diviseur la moyenne de ces deux nombres. Mais laquelle ? Pour une méthode, ce sera la moyenne arithmétique, pour une autre, la moyenne géométrique – ou proportionnelle – pour une autre encore, la moyenne harmonique. On se retrouve avec cinq méthodes qui utilisent les diviseurs suivants, en fonction du nombre S de sièges déjà détenus par un département avant l’attribution éventuelle du siège en jeu (dans notre exemple, S = 6) :
MDE = méthode du diviseur par excès : …………….… S+1 = 7,00
MDA = méthode du diviseur arithmétique : ……………. S+½ = 6,50
MDG = méthode du diviseur géométrique : …..….. √ S∙(S+1) = 6,48
MDH = méthode du diviseur harmonique : … S∙(S+1) / (S+½) = 6,46
MDD = méthode du diviseur par défaut : ……...…..……… S = 6,00
MDE est donc la méthode de Jefferson et MDD celle d’Adams. MDA, la méthode de Daniel Webster (sénateur du Massachusetts), parut dans les années 1830 et André Sainte‑Lagüe (Cnam) publia une étude à son sujet en 1910. MDH, la méthode de James Dean (Dartmouth College), parut elle aussi dans les années 1830. Enfin MDG, la méthode de Joseph Hill (U.S. Census Bureau), parut en 1911 et fut analysée par Edward Huntington (université de Hardvard).
Les répartitions obtenues diffèrent sensiblement selon la méthode employée. On trouvera, ci-dessous, celles de 566 sièges de l’Assemblée nationale, calculées sur la base des populations officielles 2009. Nous n’avons pas pris en compte les onze sièges réservés à la représentation des Français établis à l’étranger. Pour une meilleure lisibilité du tableau, nous n’avons indiqué que la répartition selon la MDA, car elle est parfaitement identique à celle que fournit la MES. Pour les autres, nous n’avons indiqué que leurs variations par rapport à la première. On constate que la MDA, la MDG et la MDH donnent des résultats très semblables, ce qu’on pouvait pressentir vu la proximité des diviseurs utilisés, que la MDE et la MDD sont aux extrémités de l’éventail et qu’elles favorisent en effet, la première, les grands départements et, la seconde, les petits. L’écart entre ces deux dernières est considérable : dans le passage de l’une à l’autre, ce ne sont pas moins de vingt-huit sièges qui sont retirés aux grands départements pour être offerts aux petits ou l’inverse. Ce sont autant de transferts de députés entre des régions plus urbaines et des régions plus rurales.
Répartition de 566 sièges
de députés par les méthodes de diviseurs
MDE |
MDA |
MDG |
MDH |
MDD |
MDE
|
MDA |
MDG |
MDH |
MDD |
|||
Nord |
+1 |
23 |
-1 |
-1 |
-2 |
Pyrénées-Or. |
4 |
|||||
Paris |
+1 |
19 |
-1 |
Eure-et-Loir |
4 |
|||||||
Bouches-du-R. |
+1 |
17 |
-1 |
Vienne |
4 |
|||||||
Rhône |
15 |
-1 |
Dordogne |
-1 |
4 |
|||||||
Hauts-de-Seine |
14 |
-1 |
-1 |
-1 |
Savoie |
-1 |
4 |
|||||
Seine-St-Denis |
+1 |
13 |
-1 |
Guadeloupe |
-1 |
4 |
||||||
Pas-de-Calais |
13 |
-1 |
Martinique |
3 |
+1 |
+1 |
+1 |
|||||
Yvelines |
+1 |
12 |
Vosges |
3 |
+1 |
|||||||
Gironde |
+1 |
12 |
Haute-Vienne |
3 |
||||||||
Val-de-Marne |
+1 |
11 |
Tarn |
3 |
||||||||
Seine-et-Marne |
+1 |
11 |
Landes |
3 |
||||||||
Seine-Mtime |
11 |
-1 |
Deux-Sèvres |
3 |
||||||||
Loire-Atlan. |
11 |
-1 |
Charente |
3 |
||||||||
Essone |
11 |
-1 |
-1 |
Allier |
3 |
|||||||
Haute-Garonne |
+1 |
10 |
Aude |
3 |
||||||||
Isère |
+1 |
10 |
Yonne |
3 |
||||||||
Val-d’Oise |
+1 |
10 |
Loir-et-Cher |
3 |
||||||||
Bas-Rhin |
+1 |
9 |
|
Lot-et-Garonne |
3 |
|||||||
Alpes-Mtimes |
+1 |
9 |
|
Cher |
3 |
|||||||
Moselle |
9 |
|
Ardèche |
-1 |
3 |
|||||||
Hérault |
9 |
|
Aube |
-1 |
3 |
|||||||
Var |
9 |
|
-1 |
Mayenne |
-1 |
3 |
||||||
Ille-et-Vilaine |
+1 |
8 |
|
Orne |
-1 |
3 |
||||||
Finistère |
8 |
|
Ardennes |
-1 |
3 |
|||||||
Oise |
7 |
|
Aveyron |
2 |
+1 |
|||||||
La Réunion |
7 |
|
Polynésie fr. |
2 |
+1 |
|||||||
Maine-et-Loire |
7 |
|
Jura |
2 |
+1 |
|||||||
Loire |
7 |
|
-1 |
-1 |
Corrèze |
2 |
||||||
Haut-Rhin |
+1 |
6 |
|
Haute-Saône |
2 |
|||||||
Meurthe-et-M. |
6 |
|
Indre |
2 |
||||||||
Haute-Savoie |
6 |
|
Nelle-Calédonie |
2 |
||||||||
Morbihan |
6 |
|
Htes-Pyrénées |
2 |
||||||||
Gard |
6 |
|
Tarn-et-Garonne |
2 |
||||||||
Calvados |
6 |
|
Nièvre |
2 |
||||||||
Loiret |
6 |
|
Haute-Loire |
2 |
||||||||
Pyrénées-Atl. |
6 |
|
Guyane |
-1 |
2 |
|||||||
Puy-de-Dôme |
5 |
|
Meuse |
-1 |
2 |
|||||||
Charen.-Mtime |
5 |
|
Haute-Marne |
-1 |
2 |
|||||||
Vendée |
5 |
|
Mayotte |
-1 |
2 |
|||||||
Indre-et-Loire |
5 |
|
Gers |
-1 |
2 |
|||||||
Côtes-d’Armor |
5 |
|
Lot |
1 |
+1 |
+1 |
+1 |
|||||
Eure |
5 |
|
Haute-Corse |
1 |
+1 |
+1 |
||||||
Ain |
5 |
|
Alpes-Hte-Pro. |
1 |
+1 |
+1 |
||||||
Marne |
5 |
|
Cantal |
1 |
+1 |
|||||||
Somme |
5 |
|
Ariège |
1 |
+1 |
|||||||
Sarthe |
5 |
|
Ter.-de-Belfort |
1 |
+1 |
|||||||
Saône-et-Loire |
5 |
|
Corse-du-Sud |
1 |
+1 |
|||||||
Aisne |
5 |
|
Hautes-Alpes |
1 |
+1 |
|||||||
Vaucluse |
5 |
|
Creuse |
1 |
||||||||
Côte-d’Or |
-1 |
5 |
|
Lozère |
1 |
|||||||
Doubs |
-1 |
5 |
|
St-Bar./St-Mar. |
1 |
|||||||
Manche |
4 |
|
Wallis-et-Fut. |
1 |
||||||||
Drôme |
4 |
|
St-Pierre-et-M. |
1 |
(On trouvera, dans la section suivante, les chiffres de population ayant servi de base aux calculs.)
La mesure du biais
Dans tout intervalle de quotes‑parts limité par deux entiers consécutifs, l’arrondi se fait par défaut au‑dessous d’une certaine limite et par excès au‑dessus. On démontre que dans la situation a priori (définie précédemment) et pour une méthode de diviseurs donnée, cette limite est égale au diviseur de l’intervalle considéré. Il suffit dès lors de répartir également un nombre astronomique de quotes‑parts entre deux entiers consécutifs pour calculer, dans cet intervalle, aussi bien la somme des quotes‑parts que celle des sièges attribués. Le biais a priori, dans cet intervalle et pour la méthode examinée, est tout simplement l’écart standardisé global relatif : (ΣS/ΣQ)-1. Si l’on choisit de le mesurer dans l’intervalle [1 ; 2] pour les différentes méthodes de diviseurs passées en revue, on obtient :
méthode |
MDE |
MDA |
MDG |
MDH |
MDD |
biais |
–33% |
0 |
+6% |
+11% |
+33% |
MDE, la méthode de la plus forte moyenne, désavantage très fortement les petits départements, alors que MDD, la méthode de la tranche, les favorise tout aussi outrancièrement. Utiliser l’une ou l’autre de ces deux méthodes pour la répartition des sièges entre les départements, dans le cas de législatives au scrutin uninominal, constitue une manipulation électorale. (Rappelons que la MDD est utilisée, en France, avec l’aval du Conseil constitutionnel.) La MDA est la seule méthode de diviseurs non biaisée ; il ne peut y en avoir d’autre. Cela nous fait donc déjà trois méthodes de répartition non biaisées avec la MES et celle du PFR, mais il en existe une infinité !
Examinons à présent une situation a priori réduite aux seuls intervalles [1 ; 2] et [13 ; 14]. Si l’on utilise la MDH, les diviseurs valent environ 1,33 et 13,48 mais les limites d’arrondi sont cette fois différentes. Nous savons néanmoins, vu le mode de fonctionnement d’une telle méthode, qu’elles restent proportionnelles aux diviseurs. Nous savons également que le nombre de sièges attribués doit être égal à la somme des quotes‑parts, non pas forcément dans chaque intervalle, mais pour les deux réunis. Cela suffit pour calculer les valeurs de ces deux limites qui valent exactement 1,35 et 13,65. On en déduit que le biais de MDH, dans cette situation a priori réduite, est d’exactement 10% en faveur des petits départements. On comprend bien que les petits départements sont favorisés par une limite d’arrondi inférieure à 1,5 et que les grands sont lésés par une limite d’arrondi supérieure à 13,5. Dans une situation de répartition réelle, comme le partage des sièges de l’Assemblée entre les départements, c’est le même mécanisme qui est à l’œuvre, mais le biais ne peut guère s’apprécier qu’en comparant la répartition effective des sièges avec celle que fournit la méthode la plus équitable.
La méthode équitable
Seule une méthode non biaisée a priori peut être considérée comme équitable mais, comme nous venons de le dire, il en existe une infinité, la condition nécessaire et suffisante étant que la limite d’arrondi soit égale à S+½ dans tout intervalle [S ; S+1]. On peut citer, par exemple, la méthode qui répartit les sièges de manière à minimiser la somme des écarts à la médiane ou celle qui minimise l’écart type. Quelle que soit la caractéristique de chacune, toutes fusionnent en une méthode unique dans la situation a priori. Ce n’est que dans une situation de répartition réelle que chacune peut, à l’occasion, révéler sa spécificité. Nous connaissons déjà la caractéristique de la méthode du PFR et celle de la MES, mais quelle est donc celle de la MDA ? L’analyse de son discriminant montre qu’elle livre toujours des répartitions telles qu’il est impossible de transférer le moindre siège d’un département à un autre sans augmenter l’écart entre leurs parts standardisées respectives (S/Q). En voici une illustration :
Répartition MDA |
Répartition MES |
|||
Q |
S |
S/Q |
S |
S/Q |
1,37 |
1 |
0,730 |
1 |
0,730 |
1,38 |
1 |
0,725 |
1 |
0,725 |
1,39 |
2 |
1,439 |
1 |
0,719 |
6,86 |
7 |
1,020 |
8 |
1,166 |
∑|PS-1| = 1,004 |
∑|PS-1| = 0,992 |
Pour minimiser la somme des écarts standardisés en partant de la répartition livrée par la MDA, il faut transférer un siège du troisième département au dernier, transfert que la MDA interdit parce que l’écart entre les parts standardisées (S/Q) desdits départements passerait de 0,419 à 0,447. On pourra s’amuser à vérifier que, dans cet exemple, la MDA ne minimise ni l’écart entre les parts standardisées extrêmes, ni l’écart moyen à la part standardisée moyenne. On notera pourtant que la MDA, comme la MES, peut parfois arrondir une quote‑part à une valeur s’en éloignant de plus d’une unité. On s’en convaincra en remplaçant, dans le tableau ci‑dessus, la valeur 6,86 par 8,86.
Il y a néanmoins une très grande proximité entre la MES et la MDA, bien plus grande qu’avec la méthode du PFR. Nous avons déjà vu que, s’agissant de la répartition des sièges de l’Assemblée entre les départements, les deux premières donnent exactement le même résultat, alors que la méthode du PFR aboutit à une répartition très légèrement différente. La raison en est bien simple. La MES peut, elle aussi, être appliquée en répartissant les sièges du premier au dernier et on utilise alors exclusivement la partie positive de son critérium :
∆ = |
S 1 – –– Q |
– |
S+1 ––– – 1 Q |
Or, ses barres de valeur absolue ne sont nécessaires que dans des situations exceptionnelles, comme celle du tableau
précédent, mais on peut quasiment toujours les supprimer et le critérium ∆ devient alors équivalent au plus fort critérium :
2(S+½) 2 – –––––– Q |
ou au plus fort critérium : |
S+½ – ––– Q |
ou au plus fort critérium : |
Pop –––– S+½ |
ce qui est le critérium de la MDA. Bref, la MDA est une simplification de la MES qui peut quasiment toujours la remplacer.
La méthode de la tranche
La méthode utilisée pour le partage des sièges de l’Assemblée est présentée officiellement comme méthode de la tranche. Sur la base des populations 2009, chaque département a droit à un député par tranche de 125 000 habitants, le nombre obtenu étant systématiquement arrondi par excès. La chose ne saute pas aux yeux mais, comme nous l’avons déjà indiqué, on démontre qu’il s’agit d’une description particulière de MDD. En fait, la tranche peut aller de 124 693 à 125 130. Ces valeurs se déterminent facilement par approximation : ce sont celles pour lesquelles on attribue le nombre de sièges imparti, ni plus, ni moins. Les autres méthodes de diviseurs peuvent, elles aussi, se décrire comme méthodes de la tranche, mais la transformation est légèrement plus complexe.
Les
assemblées réelles
Les tableaux qui suivent présentent la répartition territoriale des sièges de l’Assemblée nationale, du Sénat et du Parlement européen. Ils sont calculés sur la base des populations officielles 2009 pour la France (INSEE) et des populations 2016 pour l’Europe (Eurostat). Pour l’Assemblée et pour le Sénat, on n’a pas tenu compte des sièges réservés aux Français établis à l’étranger, car leur nombre n’a pas été déterminé à partir d’un chiffre de population. Les tableaux donnent, pour chaque département ou pays, la population, la quote‑part, le nombre de sièges, la différence par rapport à un partage équitable selon la MES et la part standardisée.
Répartition de 566 sièges
de l’Assemblée nationale
Population |
Q |
S |
diff. |
S/Q |
Population |
Q |
S |
diff. |
S/Q |
|||
Nord |
2
565 257 |
22,71 |
21 |
-2 |
0,92 |
Pyrénées-Or. |
432
112 |
3,83 |
4 |
1,05 |
||
Paris |
2
181 371 |
19,31 |
18 |
-1 |
0,93 |
Eure-et-Loir |
421
114 |
3,73 |
4 |
1,07 |
||
Bouches-du-R. |
1
937 405 |
17,15 |
16 |
-1 |
0,93 |
Vienne |
418
460 |
3,71 |
4 |
1,08 |
||
Rhône |
1
669 655 |
14,78 |
14 |
-1 |
0,95 |
Dordogne |
404
052 |
3,58 |
4 |
1,12 |
||
Hauts-de-Seine |
1
536 100 |
13,60 |
13 |
-1 |
0,96 |
Savoie |
403 090 |
3,57 |
4 |
1,12 |
||
Seine-St-Denis |
1
491 970 |
13,21 |
12 |
-1 |
0,91 |
Guadeloupe |
400
736 |
3,55 |
4 |
1,13 |
||
Pas-de-Calais |
1
453 387 |
12,87 |
12 |
-1 |
0,93 |
Martinique |
397
732 |
3,52 |
4 |
+1 |
1,14 |
|
Yvelines |
1
395 804 |
12,36 |
12 |
0,97 |
Vosges |
379
975 |
3,36 |
4 |
+1 |
1,19 |
||
Gironde |
1
393 758 |
12,34 |
12 |
0,97 |
Haute-Vienne |
367
156 |
3,25 |
3 |
0,92 |
|||
Val-de-Marne |
1
298 340 |
11,50 |
11 |
0,96 |
Tarn |
365
335 |
3,23 |
3 |
0,93 |
|||
Seine-et-Marne |
1
273 488 |
11,28 |
11 |
0,98 |
Landes |
362
827 |
3,21 |
3 |
0,93 |
|||
Seine-Mtime |
1
243 834 |
11,01 |
10 |
-1 |
0,91 |
Deux-Sèvres |
359
711 |
3,18 |
3 |
0,94 |
||
Loire-Atlant. |
1
234 085 |
10,93 |
10 |
-1 |
0,92 |
Charente |
347
037 |
3,07 |
3 |
0,98 |
||
Essonne |
1
198 273 |
10,61 |
10 |
-1 |
0,94 |
Allier |
343
309 |
3,04 |
3 |
0,99 |
||
Hte-Garonne |
1
186 330 |
10,50 |
10 |
0,95 |
Aude |
341
022 |
3,02 |
3 |
0,99 |
|||
Isère |
1
169 491 |
10,35 |
10 |
0,97 |
Yonne |
340
088 |
3,01 |
3 |
1,00 |
|||
Val-d’Oise |
1
157 052 |
10,24 |
10 |
0,98 |
Loir-et-Cher |
325
182 |
2,88 |
3 |
1,04 |
|||
Bas-Rhin |
1
079 016 |
9,55 |
9 |
0,94 |
Lot-et-Garonne |
322
292 |
2,85 |
3 |
1,05 |
|||
Alpes-Mtimes |
1
073 184 |
9,50 |
9 |
0,95 |
Cher |
314
675 |
2,79 |
3 |
1,08 |
|||
Moselle |
1
036 776 |
9,18 |
9 |
0,98 |
Ardèche |
306
238 |
2,71 |
3 |
1,11 |
|||
Hérault |
1
001 041 |
8,86 |
9 |
1,02 |
Aube |
299
704 |
2,65 |
3 |
1,13 |
|||
Var |
985 099 |
8,72 |
8 |
-1 |
0,92 |
Mayenne |
299
000 |
2,65 |
3 |
1,13 |
||
Ille-et-Vilaine |
945 851 |
8,37 |
8 |
0,96 |
Orne |
292
879 |
2,59 |
3 |
1,16 |
|||
Finistère |
883 001 |
7,82 |
8 |
1,02 |
Ardennes |
285
653 |
2,53 |
3 |
1,19 |
|||
Oise |
792 975 |
7,02 |
7 |
1,00 |
Aveyron |
273
377 |
2,42 |
3 |
+1 |
1,24 |
||
La Réunion |
781 962 |
6,92 |
7 |
1,01 |
Polynésie fr. |
259
596 |
2,30 |
3 |
+1 |
1,31 |
||
Maine-et-Loire |
766 659 |
6,79 |
7 |
1,03 |
Jura |
257
399 |
2,28 |
3 |
+1 |
1,32 |
||
Loire |
741 269 |
6,56 |
6 |
-1 |
0,91 |
Corrèze |
240 363 |
2,13 |
2 |
0,94 |
||
Haut-Rhin |
736 477 |
6,52 |
6 |
0,92 |
Haute-Saône |
235
867 |
2,09 |
2 |
0,96 |
|||
Meurthe-et-M. |
725 302 |
6,42 |
6 |
0,93 |
Indre |
232
959 |
2,06 |
2 |
0,97 |
|||
Haute-Savoie |
696 255 |
6,16 |
6 |
0,97 |
Nelle-Calédonie |
229
728 |
2,03 |
2 |
0,98 |
|||
Morbihan |
694 821 |
6,15 |
6 |
0,98 |
Htes-Pyrénées |
227
736 |
2,02 |
2 |
0,99 |
|||
Gard |
683 169 |
6,05 |
6 |
0,99 |
Tarn-et-Garonne |
226
849 |
2,01 |
2 |
1,00 |
|||
Calvados |
671 351 |
5,94 |
6 |
1,01 |
Nièvre |
222
220 |
1,97 |
2 |
1,02 |
|||
Loiret |
645 325 |
5,71 |
6 |
1,05 |
Haute-Loire |
219
484 |
1,94 |
2 |
1,03 |
|||
Pyrénées-Atl. |
636 849 |
5,64 |
6 |
1,06 |
Guyane |
205
954 |
1,82 |
2 |
1,10 |
|||
Puy-de-Dôme |
623 463 |
5,52 |
5 |
0,91 |
Meuse |
193
696 |
1,72 |
2 |
1,17 |
|||
Charen.-Mtime |
598 915 |
5,30 |
5 |
0,94 |
Haute-Marne |
187
652 |
1,66 |
2 |
1,20 |
|||
Vendée |
597 185 |
5,29 |
5 |
0,95 |
Mayotte |
186
452 |
1,65 |
2 |
1,21 |
|||
Indre-et-Loire |
580 312 |
5,14 |
5 |
0,97 |
Gers |
181
375 |
1,61 |
2 |
1,25 |
|||
Côtes-d’Armor |
570 861 |
5,05 |
5 |
0,99 |
Lot |
169
531 |
1,50 |
2 |
+1 |
1,33 |
||
Eure |
567 221 |
5,02 |
5 |
1,00 |
Haute-Corse |
158
400 |
1,40 |
2 |
+1 |
1,43 |
||
Ain |
566 740 |
5,02 |
5 |
1,00 |
Alpes-Hte-Pro. |
154
501 |
1,37 |
2 |
+1 |
1,46 |
||
Marne |
565 841 |
5,01 |
5 |
1,00 |
Cantal |
149
682 |
1,33 |
2 |
+1 |
1,51 |
||
Somme |
564 319 |
5,00 |
5 |
1,00 |
Ariège |
146 289 |
1,30 |
2 |
+1 |
1,54 |
||
Sarthe |
553 484 |
4,90 |
5 |
1,02 |
Ter.-de-Belfort |
141
201 |
1,25 |
2 |
+1 |
1,60 |
||
Saône-et-Loire |
549 361 |
4,86 |
5 |
1,03 |
Corse-du-Sud |
135
718 |
1,20 |
2 |
+1 |
1,66 |
||
Aisne |
537 061 |
4,76 |
5 |
1,05 |
Hautes-Alpes |
130
752 |
1,16 |
2 |
+1 |
1,73 |
||
Vaucluse |
534 291 |
4,73 |
5 |
1,06 |
Creuse |
123
401 |
1,09 |
1 |
0,92 |
|||
Côte-d’Or |
517 168 |
4,58 |
5 |
1,09 |
Lozère |
76
800 |
0,68 |
1 |
1,47 |
|||
Doubs |
516
157 |
4,57 |
5 |
1,09 |
St-Mar./St-Bar. |
43 518 |
0,39 |
1 |
2,60 |
|||
Manche |
492 563 |
4,36 |
4 |
0,92 |
Wallis-et-Fut. |
13 484 |
0,12 |
1 |
8,38 |
|||
Drôme |
468 608 |
4,15 |
4 |
0,96 |
St-Pierre-et-M. |
6 125 |
0,05 |
1 |
18,44 |
La répartition analysée est celle qui fut utilisée pour les législatives de 2012. Le nombre de députés est fixé à 577 dont onze représentent les Français établis à l’étranger. Les 566 sièges restants sont répartis entre 106 départements ou communautés territoriales proportionnellement à leurs populations respectives. La méthode utilisée est la MDD, la plus biaisée qui soit en faveur des petits départements. Un coup d’œil sur la colonne diff. montre que, par rapport à un partage équitable, ils gagnent onze sièges au détriment des plus grands. Mais ce n’est qu’une vue partielle des choses, car les députés accordés aux Français établis à l’étranger ont, eux aussi, été retirés aux grands départements. Si l’on n’oublie pas le découpage électoral partisan des circonscriptions, on voit combien le scrutin est manipulé.
Les modalités du droit de vote récemment octroyé aux Français de l’étranger posent problème. Voilà un groupe de citoyens à qui on réserve spécifiquement onze circonscriptions. En cas de scrutin très serré, ils pourraient décider de la majorité parlementaire à eux seuls, et donc des lois auxquelles seraient soumis l’ensemble des citoyens alors qu’eux mêmes ne sont pas concernés. Pour certains bi-nationaux, c’est carrément accorder le droit de vote à des militaires et à des fonctionnaires étrangers ! Dans la section suivante, nous verrons que, dans le cadre des élections nationales que nous avons proposées, on pourrait leur attribuer des députés sur le plan territorial, mais sans prendre en compte leur vote pour la répartition politique des sièges au niveau national.
Répartition de 336 sièges
du Sénat
Population |
Q |
S |
diff. |
S/Q |
Population |
Q |
S |
diff. |
S/Q |
|||
Nord |
2
567 257 |
13,48 |
11 |
-2 |
0,82 |
Eure-et-Loir |
421
114 |
2,21 |
2 |
0,90 |
||
Paris |
2
181 371 |
11,47 |
12 |
+1 |
1,05 |
Vienne |
418
460 |
2,20 |
3 |
+1 |
1,36 |
|
Bouches-du-R. |
1
937 405 |
10,18 |
8 |
-2 |
0,79 |
Dordogne |
404
052 |
2,12 |
2 |
0,94 |
||
Rhône |
1
669 655 |
8,78 |
7 |
-2 |
0,80 |
Savoie |
403
090 |
2,12 |
2 |
0,94 |
||
Hauts-de-Seine |
1
536 100 |
8,07 |
7 |
-1 |
0,87 |
Guadeloupe |
400 736 |
2,11 |
2 |
0,95 |
||
Seine-St-Denis |
1
491 970 |
7,84 |
6 |
-2 |
0,77 |
Martinique |
397
732 |
2,09 |
2 |
0,96 |
||
Pas-de-Calais |
1
453 387 |
7,64 |
7 |
0,92 |
Vosges |
379
975 |
2,00 |
2 |
1,00 |
|||
Yvelines |
1
395 804 |
7,34 |
6 |
-1 |
0,82 |
Haute-Vienne |
367
156 |
1,93 |
2 |
1,04 |
||
Gironde |
1
393 758 |
7,33 |
6 |
-1 |
0,82 |
Tarn |
365
335 |
1,92 |
2 |
1,04 |
||
Val-de-Marne |
1
298 340 |
6,82 |
6 |
-1 |
0,88 |
Landes |
362
827 |
1,91 |
2 |
1,05 |
||
Seine-et-Marne |
1
273 488 |
6,69 |
6 |
-1 |
0,90 |
Deux-Sèvres |
359
711 |
1,89 |
2 |
1,06 |
||
Seine-Mtime |
1
243 834 |
6,54 |
6 |
0,92 |
Charente |
347
037 |
1,82 |
2 |
1,10 |
|||
Loire-Atlan. |
1
234 085 |
6,49 |
5 |
-1 |
0,77 |
Allier |
343
309 |
1,80 |
2 |
1,11 |
||
Essonne |
1
198 273 |
6,30 |
5 |
-1 |
0,79 |
Aude |
341
022 |
1,79 |
2 |
1,12 |
||
Hte-Garonne |
1
186 330 |
6,24 |
5 |
-1 |
0,80 |
Yonne |
340
088 |
1,79 |
2 |
1,12 |
||
Isère |
1
169 491 |
6,15 |
5 |
-1 |
0,81 |
Loir-et-Cher |
325
182 |
1,71 |
2 |
1,17 |
||
Val-d’Oise |
1
157 052 |
6,08 |
5 |
-1 |
0,82 |
Lot-et-Garonne |
322
292 |
1,69 |
2 |
1,18 |
||
Bas-Rhin |
1
079 016 |
5,67 |
5 |
-1 |
0,88 |
Cher |
314
675 |
1,65 |
2 |
1,21 |
||
Alpes-Mtimes |
1
073 184 |
5,64 |
5 |
0,89 |
Ardèche |
306
238 |
1,61 |
2 |
1,24 |
|||
Moselle |
1
036 776 |
5,45 |
5 |
0,92 |
Aube |
299
704 |
1,58 |
2 |
1,27 |
|||
Hérault |
1
001 041 |
5,26 |
4 |
-1 |
0,76 |
Mayenne |
299
000 |
1,57 |
2 |
1,27 |
||
Var |
985 099 |
5,18 |
4 |
-1 |
0,77 |
Orne |
292
879 |
1,54 |
2 |
+1 |
1,30 |
|
Ille-et-Vilaine |
945 851 |
4,97 |
4 |
-1 |
0,80 |
Ardennes |
285
653 |
1,50 |
2 |
+1 |
1,33 |
|
Finistère |
883 001 |
4,64 |
4 |
-1 |
0,86 |
Aveyron |
273
377 |
1,44 |
2 |
+1 |
1,39 |
|
Oise |
792 975 |
4,17 |
4 |
0,96 |
Polynésie fr. |
259
596 |
1,36 |
2 |
+1 |
1,47 |
||
La Réunion |
781 962 |
4,11 |
4 |
0,97 |
Jura |
257
399 |
1,35 |
2 |
+1 |
1,48 |
||
Maine-et-Loire |
766 659 |
4,03 |
4 |
0,99 |
Corrèze |
240
363 |
1,26 |
2 |
+1 |
1,58 |
||
Loire |
741 269 |
3,90 |
4 |
1,03 |
Haute-Saône |
235
867 |
1,24 |
2 |
+1 |
1,61 |
||
Haut-Rhin |
736 477 |
3,87 |
4 |
1,03 |
Indre |
232
959 |
1,22 |
2 |
+1 |
1,63 |
||
Meurthe-et-M. |
725 302 |
3,81 |
4 |
1,05 |
Nelle-Calédonie |
229
728 |
1,21 |
2 |
+1 |
1,66 |
||
Haute-Savoie |
696 255 |
3,66 |
3 |
-1 |
0,82 |
Htes-Pyrénées |
227
736 |
1,20 |
2 |
+1 |
1,67 |
|
Morbihan |
694 821 |
3,65 |
3 |
-1 |
0,82 |
Tarn-et-Garonne |
226
849 |
1,19 |
2 |
+1 |
1,68 |
|
Gard |
683 169 |
3,59 |
3 |
0,84 |
Nièvre |
222
220 |
1,17 |
2 |
+1 |
1,71 |
||
Calvados |
671 351 |
3,53 |
3 |
0,85 |
Haute-Loire |
219
484 |
1,15 |
2 |
+1 |
1,73 |
||
Loiret |
645 325 |
3,39 |
3 |
0,88 |
Guyane |
205
954 |
1,08 |
2 |
+1 |
1,85 |
||
Pyrénées-Atl. |
636 849 |
3,35 |
3 |
0,90 |
Meuse |
193
696 |
1,02 |
2 |
+1 |
1,96 |
||
Puy-de-Dôme |
623 463 |
3,28 |
3 |
0,92 |
Haute-Marne |
187
652 |
0,99 |
2 |
+1 |
2,03 |
||
Charen.-Mtime |
598 915 |
3,15 |
3 |
0,95 |
Mayotte |
186
452 |
0,98 |
2 |
+1 |
2,04 |
||
Vendée |
597 185 |
3,14 |
3 |
0,96 |
Gers |
181
375 |
0,95 |
2 |
+1 |
2,10 |
||
Indre-et-Loire |
580 312 |
3,05 |
3 |
0,98 |
Lot |
169 531 |
0,89 |
2 |
+1 |
2,24 |
||
Côtes-d’Armor |
570 861 |
3,00 |
3 |
1,00 |
Haute-Corse |
158
400 |
0,83 |
1 |
1,20 |
|||
Eure |
567 221 |
2,98 |
3 |
1,01 |
Alpes-Hte-Pro. |
154 501 |
0,81 |
1 |
1,23 |
|||
Ain |
566 740 |
2,98 |
3 |
1,01 |
Cantal |
149
682 |
0,79 |
2 |
+1 |
2,54 |
||
Marne |
565 841 |
2,97 |
3 |
1,01 |
Ariège |
146 289 |
0,77 |
1 |
1,30 |
|||
Somme |
564 319 |
2,97 |
3 |
1,01 |
Ter.-de-Belfort |
141
201 |
0,74 |
1 |
1,35 |
|||
Sarthe |
553 484 |
2,91 |
3 |
1,03 |
Corse-du-Sud |
135
718 |
0,71 |
1 |
1,40 |
|||
Saône-et-Loire |
549 361 |
2,89 |
3 |
1,04 |
Hautes-Alpes |
130
752 |
0,69 |
1 |
1,46 |
|||
Aisne |
537 061 |
2,82 |
3 |
1,06 |
Creuse |
123
401 |
0,65 |
2 |
+1 |
3,08 |
||
Vaucluse |
534 291 |
2,81 |
3 |
1,07 |
Lozère |
76 800 |
0,40 |
1 |
2,48 |
|||
Côte-d’Or |
517 168 |
2,72 |
3 |
1,10 |
Saint-Martin |
35 263 |
0,19 |
1 |
5,40 |
|||
Doubs |
516 157 |
2,71 |
3 |
1,11 |
Wallis-et-Fut. |
13 484 |
0,07 |
1 |
14,11 |
|||
Manche |
492
563 |
2,59 |
3 |
1,16 |
St-Barthélémy |
8 255 |
0,04 |
1 |
23,05 |
|||
Drôme |
468 608 |
2,46 |
3 |
+1 |
1,22 |
St-Pierre-et-M. |
6 125 |
0,03 |
1 |
31,06 |
||
Pyrénées-Or. |
432 112 |
2,27 |
3 |
+1 |
1,32 |
Nous avons déjà exposé le mécanisme des élections sénatoriales ; la répartition des sièges n’en est qu’un élément. Les Français de l’étranger ont droit à douze représentants soit, proportionnellement, 80% de plus qu’à l’Assemblée, et on se demande bien quelles collectivités ces élus représentent puisque tel est le rôle assigné au Sénat. Lorsqu’on examine la répartition dans le détail, on constate que le Nord, avec près de 400 000 habitants de plus que Paris, a un sénateur de moins et que la Creuse en détient deux, quand une demi-douzaine de départements plus peuplés n’en ont qu’un. Aucune méthode, aussi biaisée soit-elle, ne peut accorder davantage de sièges à un département moins peuplé. À la haute assemblée, la répartition des sièges est votée arbitrairement par les sénateurs. Par rapport à l’équité, ce sont 24 sièges qui sont transférés des grands départements aux petits. Mais il faut, au Sénat aussi, y ajouter ceux des Français de l’étranger, toujours prélevés sur la part des plus grands. Au total, les transferts sont, proportionnellement, plus de deux fois plus nombreux qu’à l’Assemblée.
Répartition des sièges du
Parlement européen
Population |
Q |
S |
diff. |
S/Q |
|
Allemagne |
82
175 684 |
125,23 |
96 |
-
30 |
0,77 |
France |
66
759 950 |
101,74 |
74 |
-
28 |
0,73 |
Italie |
60
665 551 |
92,45 |
73 |
-
20 |
0,79 |
Espagne |
46
440 099 |
70,77 |
54 |
-
17 |
0,76 |
Pologne |
37
967 209 |
57,86 |
51 |
- 7 |
0,88 |
Roumanie |
19
760 314 |